Mes lectures autobiographiques

Sur cette page, vous trouverez une sélection de romans autobiographiques, remarquables à mes yeux.


DANBÉ
Aya Cissoko et Marie Desplechin

Editeur : Calmann-Lévy
Date de publication : février 2011

J’aime notamment…

- Le rythme des mots, de la voix : la force retenue
– La modestie du discours : un parcours courageux et brillant, conté sans cérémonie
– La critique sans le jugement : un message de tolérance et d’ouverture d’esprit

L’un de mes passages préférés :

À trente et un an, Aya Cissoko est championne du monde de boxe anglaise (2006) et étudiante à l’Institut d’études politiques de Paris. Co-écrite avec l’écrivaine Marie Desplechin, son histoire donne à voir sa force de caractère. Sa petite enfance, elle l’a passée à Paris dans le quartier des Amandiers, dans un logement de moins de vingt mètres carrés, avec ses parents, ses deux frères et sa sœur.

« Je dois au même homme d’avoir découvert que je sais lire et que je suis pauvre. M. Casanova, l’instituteur, a demandé aux élèves d’apporter avec eux un classeur bleu. Dans mon souvenir, le classeur est superbe et très bleu. Les enfants diront à leurs parents de l’acheter, ce n’est quand même pas compliqué. Je demande à mon père. Je tombe mal. Ce n’est pas du tout le moment, il n’a pas de quoi payer. La patience de M. Casanova est à bout. Il me convoque pendant la récréation, pour une petite explication. Quand j’annonce qu’il n’y a toujours pas de classeur, il me donne une tape sur l’arrière de la tête. Elle est suffisamment forte pour que mon front aille cogner contre la table. C’est la seule cicatrice que j’ai au visage. On croit qu’il s’agit du souvenir d’un combat. Ce serait la boxe. Mais non, c’est M. Casanova, dans un autre genre de combat. Il en conçoit d’ailleurs une telle culpabilité qu’il se fera un devoir de m’amener à la lecture. Mon père, qui vient nous chercher à la sortie de l’école, est consterné. Mais il n’aurait pas l’idée d’aller se plaindre. Il y a des hiérarchies qu’on ne conteste pas. C’est vers moi qu’il se penche. Il me demande pardon. « C’est de ma faute, murmure-t-il, je n’ai pas d’argent. » Je devine alors que nous sommes pauvres, ce qui peut constituer un danger, à l’école par exemple, mais aussi une forme d’alliance. Je suis la fille de mon père. »


UN ROMAN FRANÇAIS
Frédéric Beigbeder

Editeur : Grasset
Date de publication : août 2009

J’aime notamment…

- Son honnêteté : un regard saisissant sur lui-même, sans concession
– L’ironie de son ton : tout en franchise et second degré
– Ses « trouvailles » scéniques : une mise en scène de lui-même tellement porteuse de sens

L’un de mes passages préférés :

L’écrivain, chroniqueur et critique littéraire et cinématographique, Frédéric Beigbeder, évoque dans son roman un portrait de lui à l’âge de neuf ans. Illustration en couverture de son roman, cette aquarelle se trouve dans sa maison, accrochée au mur de l’escalier.

« Parfois il me regarde, quand je rentre tard, et semble me juger. Le garçonnet angélique contemple sa propre déchéance avec effarement. Il m’arrive, lorsque je suis vraiment aviné, d’insulter le petit garçon sage qui plastronne sur mon mur, fier de son âge, méprisant ce que j’ai fait de son avenir :

— Eh oh crétin des Pyrénées ! Arrête de me dévisager de la sorte ! Tu n’as pas encore dix ans, tu vis dans un appart’ avec ta mère divorcée, tu es en classe de huitième chez les prêtres, tu dors dans la même chambre que ton frangin, tu collectionnes les gadgets de Pif, tu devrais être fier de l’homme que tu es devenu ! J’ai réalisé tous tes rêves, te voilà écrivain, petit morveux, tu pourrais m’admirer au lieu de prendre cet air de reproche !

Pas de réponse : les aquarelles ont le mutisme arrogant.

— Putain mais tu te prends pour qui ?

— Pour toi.

— Et je te déçois tant que ça ?

— Ça m’embête juste de savoir que dans trente ans j’aurai une haleine de clodo et que je parlerai à un tableau.

— Mais arrête de me juger aussi ! Tu veux quoi de plus, bordel ? Qu’est-ce qu’il te faut ? JE SUIS TOI EN PLUS VIEUX, c’est tout ! On est le même homme, merde !

— Tu veux dire le même enfant ? »


LE RIRE DU CHAT QUI PISSE SUR LA BRAISE,
SOUVENIR D’UN ÉPICURIEN
Michel Oliver

Editeur : Les Éditions de l’Aube
Date de publication : octobre 2010

J’aime notamment…

- Son humour : le talent de dire avec aplomb et légèreté
– Sa simplicité : des faits surtout, un point de vue en filigrane
– Son engagement : la passion qui le conduit avec détermination au bout de ses idées

L’un de mes passages préférés :

Après avoir révélé ses recettes, en livres et en radio, dans Le rire du chat qui pisse sur la braise, le cuisinier Michel Oliver dévoile l’histoire de sa vie, sur les traces de son père. Dans ce passage, le jeune Michel Oliver vient de rater son Bac.

« Aujourd’hui encore, je regrette l’étroitesse d’esprit du correcteur qui me mit un zéro en latin. Bien sûr, ma traduction n’avait strictement rien à voir avec le texte, mais elle était portée par un souffle poétique qui manquait singulièrement à l’original…

Ma décision était prise.

Je serais cuisinier.

Je fis ma maigre valise, dis adieu à ma mère et traversai Langon pour rejoindre l’hôtel de mes grands-parents.

L’accueil de ma grand-mère fut à la hauteur de mes espérances.

« C’est formidable de continuer la tradition familiale ! Ton père va être ravi. Je vais tout de suite l’appeler à Paris pour lui annoncer la bonne nouvelle. »

Le téléphone était encastré dans l’entrée de la cuisine. Grand-mère décrocha l’appareil, tourna longuement la manivelle jusqu’à ce que l’opératrice lui réponde et elle lui dit simplement : « Passez-moi mon fils ! »

Eh oui ! C’était comme ça dans les campagnes ; mon père, qui avait réussi à Paris, était la vedette.

« Michel, prend l’écouteur. Allô, Raymond ? C’est maman. J’ai une grande nouvelle à t’annoncer : Michel a décidé de faire le métier, et je l’ai pris en charge !

— Maman, c’est un petit con, il ne fera jamais rien ! Renvoie-le chez sa mère. »

Où que j’aille, j’ai toujours ce putain d’écouteur accroché à mon oreille. Et c’est de cette phrase prononcée par mon père que ma rage de réussir est née. »

D’autres romans autobiographiques bientôt à venir pour enrichir cette sélection. Pour être averti des parutions, il suffit de le demander !

Tenez-vous informé des nouveautés !

J’enrichis cette sélection de temps en temps. Pour être averti de la parution d’une nouvelle lecture autobiographique, il suffit de le demander !

haut de page